Les règles déontologiques européennes / Perspectives d'évolution à Bruxelles

Présentation de l’intervention de Maître Jean Jacques FORRER

 

 

Les libertés de circulation dont bénéficient les avocats en Europe ont entraîné le développement d’une déontologie européenne nécessaire au règlement des difficultés liées aux activités transfrontalière de l’avocat. Dès 1977, la Directive 77/249/CEE a été adoptée afin de faciliter l’exercice effectif de la libre prestation de services par les avocats. Ce texte, toujours en vigueur, permet à un avocat d’exercer son activité, de manière occasionnelle et discontinue, dans un autre Etat membre de l’Union européenne. En 1998, une seconde directive « Avocat » a été adopté : la directive 98/5/CE visant à faciliter l’exercice permanent de la profession d’avocat dans un Etat membre autre qui celui où la qualification a été acquise. Elle permet à tout avocat qualifié dans un Etat membre d’exercer à titre permanent sous son titre professionnel d’origine, à savoir de manière habituelle et stable, dans un autre Etat membre de l’Union.

 

La déontologie européenne a également été impactée ces dernières années par le renforcement des règles en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et de lutte contre le terrorisme pour lesquelles l’Union a adoptée pas moins de 4 directives depuis le début des années 90. Ces règles ont imposé de nouvelles obligations à l’avocat et conduit à l’émiettement du secret professionnel, principe essentiel à la profession et au maintien de l’Etat de droit. Ainsi, lorsque l’avocat agit, notamment, au nom et pour le compte de son client dans une transaction financière ou immobilière, il est soumis à des obligations spécifiques, telles que de la déclaration de soupçons. En outre, l’impact du droit de l’Union européenne sur la déontologie est également perceptible dans de nouveaux domaines d’activité des avocats, tel que la représentation d’intérêts et le lobbying. En effet, l’Union a mis en place un registre européen de transparence qui s’applique aux avocats qui mènent des activités de lobbying auprès des institutions de l’UE, ce qui a poussé le Conseil National des Barreaux à modifier le Règlement Intérieur National. 

 

Présentation de l’intervention de Maître Bertrand Debosque

Le bénéfice des libertés de circulation pour les avocats ne va pas sans poser certaines difficultés puisque lorsqu’ils exercent leurs activités dans un autre Etat membre, que ce soit en libre prestation de service ou en libre établissement, les avocats sont soumis, en vertu des directives, à une « double déontologie », celle de l’Etat d’origine et celle de l’Etat d’accueil. Or si les règles déontologiques nationales répondent à des valeurs communes, chaque Barreau national a des règles spécifiques, issues de ses propres traditions et du système juridique de sa juridiction, et des conflits déontologiques peuvent se poser.

Afin de surmonter ces difficultés, le Conseil des Barreaux européens (CCBE), créé en 1966, a adopté le « Code de déontologie des avocats européens » en 1988. Cet instrument n’a pas, en tant que tel, de valeur juridique contraignante puisqu’il appartient aux organes représentatifs de la profession de le rendre applicable dans leur juridiction respective. En outre, il n’a vocation à s’appliquer que dans les activités transfrontalière de l’avocat au sein de l’Union européenne et de l’Espace économique européen. Ce code a directement été intégré en France dans les Règlement Intérieur National et fait donc partie intégrale des règles déontologiques des avocats français. Toutefois, son application n’est pas uniforme et varie d’un Etat à un autre, certains ayant décidé, comme en France, de l’incorporer directement dans les règles nationales alors que d’autres ne l’ont que transposé (Royaume-Uni) totalement ou partiellement ou en font simplement référence (Allemagne).

Le Code du CCBE contient des règles relatives aux principes généraux (indépendance, secret professionnel) aux rapports avec les clients (conflit d’intérêts, interdiction du pacte de quota litis), avec les magistrats (contradictoire, respect du juge) et aux rapports entre avocats (confraternité, correspondance entre avocats, règle de ducroire). Les dispositions du code ont récemment fait l’objet d’une évaluation par le comité Déontologie du CCBE qui a révélé des difficultés d’application dans certains Etats (quant à l’interdiction du pacte de quota litis par exemple).

En 2006, le CCBE a adopté la Charte des principes essentiels de l’avocat européen. Celle-ci n’est pas conçue comme une « code de déontologie ». Il s’agit d’un instrument à vocation paneuropéenne dont l’application s’étend au-delà des Etats membres, associés et observateurs du CCBE. La Charte énonce 10 principes essentiels et communs à l’ensemble de la profession d’avocat en Europe. Ainsi, elle a pour objet, notamment, d’aider les barreaux qui luttent pour faire reconnaître leur indépendance dans les démocraties émergentes et d’accroître la compréhension de l’importance du rôle de l’avocat dans la société, en s’adressant aux avocats eux-mêmes, aux décideurs et au public en général.

En 2008, le CCBE a mis en œuvre un nouveau chantier, celui de la rédaction d’un code « harmonisé » de déontologie pour les avocats européens qui aurait vocation à s’appliquer de manière uniforme non seulement dans leurs activités transfrontalières mais également dans leurs activités nationales. Ce dernier s’est vu attribuer une nouvelle dénomination en 2014, le « code modèle de déontologie ». 3 articles ont été adoptés, à savoir ceux relatifs au Secret professionnel au Conflit d’intérêts et à l’indépendance de l’avocat. 

 

Les spécificités de l’avocat mandataire en transactions immobilières : rôle et présence en Europe et dans le monde

Présentation de l’intervention de Maître Jean Jacques FORRER

La Délégation des Barreaux de France a sollicité, le 13 février 2017, les délégations  nationales auprès  du CCBE afin de connaître la règlementation applicable à l’activité de l’avocat mandataire en transaction immobilière dans leurs juridictions respectives. A la suite de cette demande, 10  pays sur 31  (comprenant les Etats membres de l’Union européenne, de l’Espace économique européen ainsi que la Suisse) ont transmis les éléments nécessaires à l’élaboration d’une étude de droit comparé qui révèle des divergences importantes dans l’appréhension de l’activité de mandataire en transaction immobilière au sein des Etats visés, relatives, notamment, à la possibilité même de l’exercer, ainsi qu’aux conditions et modalités de son exercice. Les résultats seront présentés lors du colloque.

 

Ces sujets seront présentés et approfondis lors du colloque sur la Déontologie Européenne et Internationale de l'Avcat

Le lundi 19 juin prochain, de 14h00 à 18h00, chez AVOCAP 2.2, 222 Boulevard Saint Germain, 75007 Paris.

Renseignements et inscription en cliquant ici